Installer une clôture entre deux propriétés semble simple. Pourtant, les règles qui encadrent ce geste sont nombreuses. Entre droits, devoirs, hauteur autorisée et entretien partagé, la mitoyenneté soulève souvent des questions… et parfois des tensions. Voici ce que vous devez savoir avant d’ériger, remplacer ou modifier une clôture séparative.
Définir la mitoyenneté : une frontière partagée
La mitoyenneté, au sens strict, désigne la copropriété d’un mur, d’une clôture ou d’un fossé entre deux terrains contigus. Elle implique une propriété commune entre voisins, avec des droits et des devoirs partagés.
Ce principe est régi par le Code civil, notamment aux articles 653 à 673. Il s’applique de manière automatique dans certaines situations. Par exemple, un mur construit en limite séparative est présumé mitoyen, sauf preuve contraire (titre de propriété, acte notarié, marque visible comme des tuiles inclinées d’un seul côté).
Clôture mitoyenne ou privative : faire la différence
Avant toute intervention, vous devez identifier le statut de la clôture existante :
- Mitoyenne : elle appartient à parts égales aux deux voisins. Son entretien, sa modification ou sa suppression nécessitent un accord mutuel. Les frais sont partagés.
- Privative : elle appartient à un seul voisin, généralement celui qui l’a construite. Elle est située entièrement sur son terrain. Ce dernier en assume seul la responsabilité.
Pour lever le doute, vous pouvez consulter le plan cadastral ou demander un bornage officiel. En cas de désaccord sur les limites, un géomètre-expert peut être sollicité.
Peut-on clôturer librement son terrain ?
Oui. Tout propriétaire a le droit de clôturer sa parcelle, même sans l’accord du voisin. Ce droit est reconnu par l’article 647 du Code civil. Néanmoins, ce droit est encadré :
- La clôture ne doit pas empiéter sur le terrain voisin.
- Elle doit respecter les règles d’urbanisme locales (PLU, carte communale).
- Elle ne doit pas nuire à la jouissance du terrain voisin (vue, passage, ensoleillement, etc.).
Il est donc fortement recommandé de consulter le règlement d’urbanisme de votre commune avant tout projet.
Hauteur et matériaux : ce que dit la loi
Il n’existe pas de règle nationale unique concernant la hauteur d’une clôture mitoyenne. Les communes fixent leurs propres règles via le Plan Local d’Urbanisme (PLU). À défaut, l’article 663 du Code civil s’applique dans les villes de plus de 2 000 habitants :
- Hauteur maximale : 3,20 mètres.
- Hauteur maximale dans les communes plus petites : 2,60 mètres.
Le choix des matériaux est également soumis aux règlements locaux. Certains PLU imposent des clôtures végétalisées, interdisent les grillages occultants ou exigent une teinte spécifique pour les murets.
Que faire en cas de désaccord avec le voisin ?
La mitoyenneté suppose une entente. En cas de conflit, mieux vaut privilégier la discussion avant d’agir. Vous ne pouvez pas :
- Surélever seul un mur mitoyen sans autorisation.
- Appliquer un enduit, une peinture ou installer un dispositif (caméra, support de plante) sans l’accord du co-propriétaire.
- Appuyer une construction contre un mur mitoyen sans le consentement écrit du voisin.
Si l’accord n’est pas possible, une médiation ou un recours au tribunal judiciaire peut être envisagé.
Qui paie l’entretien d’une clôture mitoyenne ?
Les charges liées à une clôture mitoyenne (réparations, ravalement, nettoyage) sont réparties entre les voisins, à parts égales. Cela inclut :
- La réfection d’un mur abîmé.
- Le remplacement d’un grillage détérioré.
- Le débroussaillage si la clôture est végétale.
S’il s’agit d’une clôture privative, le propriétaire concerné supporte seul les frais.
Peut-on rendre mitoyen un mur existant ?
Oui. Si vous souhaitez bénéficier de la mitoyenneté sur un mur privatif édifié en limite de votre terrain, vous pouvez en devenir co-propriétaire. Il suffit d’en faire la demande au voisin concerné. En cas d’accord, vous devrez lui verser la moitié de la valeur actuelle du mur, augmentée de la moitié de la valeur du sol qu’il occupe.
Cette procédure s’appelle « l’acquisition de la mitoyenneté » et doit être actée par écrit (acte notarié recommandé). Le mur devient alors officiellement mitoyen.
Plantation en limite de propriété : quelles règles ?
Les haies et arbustes peuvent également marquer une séparation entre deux terrains. Là aussi, la mitoyenneté peut s’appliquer si la haie est plantée sur la limite. Dans ce cas, l’entretien est partagé.
Sinon, les distances minimales doivent être respectées :
- 2 mètres de la limite séparative pour les plantations de plus de 2 mètres de hauteur.
- 50 cm pour celles de moins de 2 mètres.
Une haie non entretenue, qui empiète sur le terrain voisin, peut faire l’objet d’une demande de coupe ou d’élagage.
Ce que vous pouvez faire (ou pas) avec votre clôture
Voici un rappel utile pour éviter les malentendus avec le voisinage :
- ✅ Construire une clôture sur votre terrain sans empiéter.
- ✅ Entretenir une clôture mitoyenne à frais partagés.
- ✅ Demander à acquérir la mitoyenneté d’un mur existant.
- ❌ Modifier une clôture mitoyenne sans accord.
- ❌ Imposer à votre voisin une hauteur ou un matériau spécifique.
- ❌ Appuyer un bâtiment sur un mur mitoyen sans autorisation.
Le rôle du notaire et des actes de propriété
Le notaire peut intervenir pour préciser le statut juridique d’une clôture lors d’une vente immobilière. Si un mur est clairement mentionné comme privatif ou mitoyen dans l’acte de vente ou dans le règlement de copropriété (lotissement), ce document fait foi.
Dans les zones rurales, il est courant de rencontrer des murs anciens dont la mitoyenneté n’a jamais été définie. Dans ce cas, le recours à un géomètre peut s’avérer utile pour clarifier la situation avant tout projet de clôture.
Conclusion : anticiper pour mieux vivre ensemble
Mieux vaut prévenir que gérer un litige de voisinage. La mitoyenneté, bien comprise, permet de sécuriser les limites d’une propriété tout en respectant les droits de chacun. Avant de poser une clôture, discutez avec votre voisin, vérifiez les règles locales et, en cas de doute, sollicitez un professionnel.
À retenir : une clôture n’est pas qu’un simple élément de séparation. Elle engage deux propriétaires lorsqu’elle est mitoyenne. C’est pourquoi mieux vaut s’appuyer sur des règles claires… et des relations saines.


